Introduire le règne du commercial dans l'univers artistique créateur, construit depuis des siècles contre lui, c'est assassiner les œuvres les plus élevées de l'humanité, c'est empêcher l'éclosion d'autres œuvres géniales du futur. La vitesse et la course au profit sont totalement antinomiques à la naissance de l'œuvre. Les «conditions écologiques de l'art» (Ernest Gombrich) sont détruites. L'art et la culture ne tardent pas à mourir. Notre passé culturel et artistique que nous admirons dans les livres et les musées, pour l'expression duquel se sont battus tant d'immenses personnalités, n'existerait pas si des pouvoirs illimités comme ceux que nous connaissons aujourd'hui avaient été placés en d'aussi mauvaises mains dans le passé.
On peut remarquer dans le langage humain, particulièrement dans notre langue française, que certains mots parmi les plus importants signifient des choses ou des actes différents, parfois même opposés. Amour en est un. Artiste en est un autre. L'amour de Tristan et Iseult ou d'une mère pour son enfant évoque-t-il dans notre esprit la même image que celle d'une prostituée à la 20e passe ? Doit-on nommer Giotto, Michel-Ange, Vinci, ou Baudelaire du même nom que la plupart des pantins actuels de la littérature, de la peinture ou du spectacle ? NON !
Les dirigeants vulgaires et ignorants, créateurs d'un nivellement par le bas insupportable, nous imposent d'assister à leur transformation sans vergogne, périodique et ridicule, vers la moralité, la foi, l'éducation, selon le vent, changeant d'épaule un fusil que l'on souhaiterait pointé vers eux !
Être Artiste n'est pas une source de profit. Elle est surtout une source de souffrances et de joies innommables où seul un très petit nombre s'abreuve. C'est une couleur d'âme comme il y a des couleurs de peaux, absolument différente de la couleur uniforme mais submergeante de ceux qui prennent notre place. On ne nous connaît plus. On ne nous reconnaît plus !!!
La BÊTE sociétale est là, laminant à tour de bras les têtes individualistes (ce qui est le propre de l'artiste) originales, parfois subversives qui dépassent. L'art est un métier requérant un incessant travail. C'est aussi un sacerdoce auquel tout ou presque est sacrifié. C'est un état dont on ne peut se soustraire. C'est un amour absolu et, comme tout amour, on ne peut le vivre seul : c'est notre faiblesse. La BÊTE veille. Elle nous barre le chemin si nous ne faisons pas partie de son système. Un artiste cherche et enfante dans la solitude pour mettre au monde un sourire sur vos lèvres, une larme sous vos paupières, un souvenir à conserver, un instant d'espoir, de courage, un peu de rêve... Notre seul droit, celui de vous aimer et d'être aimer de vous. Notre seul devoir, vous offrir le goût du choix, œil à œil, cœur à cœur, sans intermédiaire. Lorsque, comme le tigre, l'Inuit, l'albatros ou la joie, nous disparaîtrons, la BÊTE pleurera comme les crocodiles.
Alors vous resterez seuls et vous souffrirez.
Nous VOUS sommes nécessaires comme VOUS nous l'êtes.
Nous les ARTISTES CRÉATEURS.
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